Istoé, 11/05/2021
À la tête du ministère brésilien de la Femme, de la Famille et des Droits humains, la pasteur évangélique Damares Alves défend un programme eugéniste dans le domaine de la maternité et a refusé d’intégrer les peuples autochtones au groupe prioritaire pour la vaccination contre le Covid-19, dénonce l’hebdomadaire Istoé.
Ministre du gouvernement Bolsonaro en charge de la Femme, de la Famille et des Droits humains, Damares Alves commet des “barbaries” à l’encontre des droits qu’elle devrait pourtant défendre, assène le magazine Istoé.
La publication l’accuse notamment de défendre une “politique eugéniste” dans le domaine de la maternité : selon Istoé, elle aurait ainsi appuyé la signature d’un arrêté du ministère de la Santé prévoyant l’achat d’implants contraceptifs qui seront spécifiquement destinés aux femmes sans domicile fixe, aux prostituées, aux prisonnières et aux porteuses de VIH et de tuberculose.
Plusieurs associations estiment que le gouvernement cherche, par cet arrêté, à contrôler la fertilité de ces groupes vulnérables.
“Dystopie brésilienne”
Pour le magazine, Damares Alves, 57 ans, semble même être “enthousiaste pour une dystopie brésilienne”, à l’instar de la célèbre série The Handmaid’s Tale (La Servante écarlate), fondée sur le roman du même nom et dans lequel les femmes deviennent “propriétés de l’État, qui décide qui peut ou non avoir des enfants”.
“Bien sûr, Damares [Alves] ne réfléchit pas à l’hypothèse d’un État s’appropriant quelqu’un physiquement”, comme cela a lieu dans le livre, souligne Istoé, “mais une telle appropriation se fera de manière subliminale et avec une perversité subtile”, puisque l’État brésilien “devient le détenteur des droits reproductifs, de la sexualité et de la féminité de celles qui sont devenues la cible de cette idéologie”.
La dictature militaire brésilienne (1964-1985) avait tenté d’implanter des projets similaires, rappelle l’hebdomadaire, qui ajoute :
“Cela confirme donc que le ministère de Damares [Alves], en toute discrétion, continue à être une sorte de centrale de l’extrémisme de la droite, dans le champ politique et social, berceau des plus rétrogrades et radicales tentatives de restrictions sur le terrain comportemental.”
Les oubliés de la politique sanitaire
En pleine pandémie, la ministre a pris une autre décision qui pourrait conduire à son audition par la commission d’enquête parlementaire instaurée fin avril par le Sénat brésilien afin de passer au crible la politique sanitaire du gouvernement Bolsonaro.
Damares Alves – en charge de son portefeuille depuis l’investiture de Bolsonaro, en 2019 – a en effet supprimé “l’offre de lits en soins intensifs et de produits d’hygiène” destinés aux Amérindiens, des peuples plus vulnérables face aux virus extérieurs et qui ont été décimés par les maladies amenées par les colons européens, indique le média.
Cette mesure équivaut à “une annulation de la loi de protection des indigènes”, qui oblige normalement l’État à assumer ces services. Justification “risible” de la ministre : les autochtones auraient été consultés.
La pasteur est aussi accusée d’avoir exclu les peuples autochtones de la vaccination contre le Covid-19, ce qui fait dire à Istoé qu’elle “montre, une fois de plus, son mépris envers l’intégrité physique, psychologique et morale des minorités”.
La ministre a par ailleurs annulé, en 2020 et cette année, l’amnistie politique de plus de 400 personnes qui s’étaient opposées à la dictature militaire, un droit pourtant garanti par la Constitution, l’expliquant par l’absence de toute persécution politique à cette période. Istoé conclut :
“Cette attitude de Damares [Alves] est le paramètre qui donne la mesure exacte du piétinement des droits de l’homme par le bolsonarisme et elle-même.”